• L’autre matin, sous la feuillée,

    De soleil rose ensoleillée,

    Je rêvais à toi, – tu passas !

    Et je vis à ta boutonnière,

    Penchant ses graines de lumière,

    Une branche de mimosas.

    « Oh ! donne-la moi, je t’en prie,

    Cette petite fleur flétrie… »

    Murmurai-je. Et tu refusas !

    D’un œil foncé qui me regarde,

    Tu refusas. Tu dis : « Je garde

    Cette branche de mimosas. »

    Et, sans voir qu’à cette seconde

    Je ne voulais plus qu’elle au monde,

    De mon tourment tu t’amusas :

    « Il y en a sur la pelouse…

    - Non, je veux, car je suis jalouse,

    Cette branche de mimosas !

    Si tu l’aimes, toute fanée,

    C’est qu’alors on te l’a donnée,

    En te taisant, tu t’accusas.

    Parle ! nomme-moi ma rivale !

    Regarde-moi… je suis plus pâle

    Que la branche de mimosas ! »

     

    Mais toi, d’une voix attendrie,

    Tu t’écrias : Ô ma chérie,

    À mes regards tu proposas

    Cent visages : des fous, des sages,

    D’autres plus fins que les feuillages

    De la branche de mimosas.

    Mais, très curieux de nature,

    Je rêvais de voir la figure

    - Car je ne la connaissais pas –

    Que vous faites, alors qu’on ose

    Vous refusez la moindre chose…

    Tiens, les voilà, les mimosas ! »

    ROSEMOMNDE GERARD


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  • Louange de l'Oliver

    Ton haleine un jour de janvier,

    Ou, tirant de grosses bouffées

    De ta pipe, charmant fumeur,

    Est-ce le train ? Sont-ce les fées?

    La cendre du jour qui se meurt ?

    Soyons justes : c’est l’olivier

    JEAN COCTEAU 


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  • C'était lors de mon premier arbre,

    J'avais beau le sentir en moi

    Il me surprit par tant de branches,

    Il était arbre mille fois

    Moi qui suis tout ce que je forme

    Je ne me savais pas si feuillu,

    Voilà que je donnais de l'ombre

    Et j'avais des oiseaux dessus.

    Je cachais ma sève divine

    Dans ce fût qui montait au ciel

    Mais j'étais pris par la racine

    Comme à un piège naturel.

    C'était lors de mon premier arbre,

    L'homme s'assit sous le feuillage

    Si tendre d'être si nouveau.

    Etais-je un chêne ou bien un orme

    C'est loin et je ne sais pas trop

    Mais je sais bien qu'il plut à l'homme

    Qui s'endormit les yeux en joie

    Pour y rêver d'un petit bois.

     Le Premier Arbre

    Alors au sortir de mon somme

    D'un coup je fis une forêt

    De grands arbres nés centenaires

    Et trois cents cerfs la parcouraient

    Avec leurs biches déjà mères.

     Jules Supervielle


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