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Par Naniland89 le 16 Septembre 2018 à 00:15
J'ai cent feuilles à mon cœur tremblant
Comme celui d'un galant ;
Brune, rousse ou blonde,
Il en est pour tout le monde.
J'ai cent feuilles tendres d'un côté
Et piquantes de l'autre,
Comme feintises et patenôtres
De jouvenceaux amignottés.
Mais sans doute, belles, peu vous chaut
D'un joli cœur d'artichaut,
Et brune, rousse ou blonde préférerait
Le simple cœur d'un dameret.
De sorte qu'il me faudra finir aussi
À la barigoule ou farci,
Dans la marmite d'un cuisinier gras
Sans même savoir qui me mangera.
J'avais cent feuilles à mon cœur tremblant
Comme celui d'un galant ;
Il en était pour toutes les belles, et plus,
Mais personne à la ronde n'en a voulu.
Tristan KLINGSOR (Le Valet de cœur – 1908)
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Par Naniland89 le 9 Septembre 2018 à 00:15
Pas un seul bruit d'insecte ou d'abeille en maraude,
Tout dort sous les grands bois accablés de soleil
Où le feuillage épais tamise un jour pareil
Au velours sombre et doux des mousses d'émeraude.
Criblant le dôme obscur, Midi splendide y rôde
Et, sur mes cils mi-clos alanguis de sommeil,
De mille éclairs furtifs forme un réseau vermeil
Qui s'allonge et se croise à travers l'ombre chaude.
Vers la gaze de feu que trament les rayons,
Vole le frêle essaim des riches papillons
Qu'enivrent la lumière et le parfum des sèves ;
Alors mes doigts tremblants saisissent chaque fil,
Et dans les mailles d'or de ce filet subtil,
Chasseur harmonieux, j'emprisonne mes rêves.
José Maria de Hérédia (les trophées 1893)
Bonne fête à mon Ti-Mari
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Par Naniland89 le 2 Septembre 2018 à 00:15
Belles fleurs, dont je vois ces jardins embellis,
Chastes Nymphes, l'Amour et le soin de l'Aurore,
Innocentes beautés que le Soleil adore,
Dont l'éclat rend la Terre et les Cieux embellis.
Allez rendre l'hommage au beau teint de Phylis,
Nommez-la votre Reine, et confessez encore,
Qu'elle est plus éclatante et plus belle que Flore,
Lorsqu'elle a plus d'oeillets, de roses, et de lis.
(belle remontée de ce rosier)
Quittez donc sans regret ces lieux et vos racines,
Pour voir une beauté, dont les grâces divines,
Blessent les coeurs des Dieux d'inévitables coups ;
Et ne vous fâchez point si vous mourez pour elle,
Aussi-bien la cruelle
Fera bientôt mourir tout le monde après vous.
Vincent Voiture
(Poésies posthumes, 1650)
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